samedi 18 avril 2020

Paul, 85 ans, verbalisé dans l’Aisne pour être avoir ramassé de l’herbe pour ses bêtes

(Journal d’un confiné  JJR #29)

Dans la litanie des motifs ubuesques de PV pour non-respect du confinement, on aura tout eu. Le site Verbalisé parce que recense les plus croquignolets, parmi lesquels l’histoire d’Hedwig, 79 ans, venue faire un petit coucou avec son ardoise magique à la fenêtre de son mari Jean-Jacques, 93 ans, à la maison de retraite de Graulhet et dont France Bleu nous apprend que la contravention a été classée. madame la préfète du Tarn ayant eu (chose rarissime dans la profession) un éclair d’humanité.
  Pandores, flics, gardes champêtres, municipaux, le doigt sur la couture du pantalon et, j’imagine, alléchés par une inavouable prime de chiffre, appliquent avec zèle les consignes du ministre de l’Intérieur, le cynique, totalement incompétent et quelque peu psychopathe Christophe Castaner, aussi efficace dans la chasse au contrevenant confinophobe que dans la répression aveugle du mouvement des Gilets jaunes. Les radars automatiques de nos province étant en cale sèche, il faut bien ramener un peu de fraîche pour payer la douloureuse (4 millions d’euros) des 650 drones récemment commandés par la place Beauvau.
  L‘histoire suivante m’a été transmise par Virginie, via Facebook, révoltée, en colère.

Paul Emery, 85 ans, vit à Fargniers (Aisne), à proximité du canal de Saint-Quentin, où il va régulièrement pour « faire de l'herbe » pour ses bêtes. Paul, qui ne sait ni lire ni écrire, est sous tutelle et vit comme autrefois. Dès son plus jeune âge, il a travaillé à la fonderie de Tergniers et chez ALB les aciéries et laminoirs de Beautor (qui ont fermé en 2012), toujours à pied car il n’a jamais appris à faire de la bicyclette.
« L’autre matin, explique Virginie, sa belle-fille, il avait bien une attestation sur elle, mais comme elle n’est pas datée, qu’il ne comprend pas le principe du confinement et qu’il est à moitié sourd, cela aurait servi à quoi ? »
  Les policiers du commissariat de Tergnierd’implacables limiers qui s’étaient illustrés en 2018 en déjouant un dangereux gang de klaxonneurs après la finale de la coupe du monde, ont « cueilli » le dangereux contrevenant aux aurores, ce 31 mars. Avant de jeter leur dévolu sur un autre monsieur du même âge, qui a eu l’audace d’aller chercher son pain sans autorisation, en chaussons. Et, sans doute, d’autres encore…
 Comme en France, tout finit par de chansons, je vous propose de vous déconfiner quelques instants et de réécouter Georges Brassens chantant (Bobino, 1972) sa célèbre chanson Hécatombe, dont le titre, je m’en excuse par avance, sonne quelque peu lugubrement en ces temps de pandémie. Pourvu que cela ne vous donne pas des idées en cas de contrôle, bien entendu !

60 millions de consommateurs indique les démarches à suivre pour contester les PV.

Exclusif. Le classement « ConfinFrance » des préfets préférés de Castaner

Journal d’un confiné de JJ Reboux #31 

Confinement oblige, le préfet, relais indispensable de la parole gouvernementale dans nos régions éloignées de la capitale (parfois à peine civilisées, ne nous le cachons pas), a pris du galon. Un galon qui lui est consubstantiel : en effet, bien que n'étant pas considéré comme un militaire ni un policier, le préfet porte un uniforme qu’il lui est loisible de porter en toutes circonstances, généralement lors de réceptions officielles (accompagnées ou pas de remises de gerbe), où il sait se faire entourer de gens convenables (notables, chefs d’entreprise, policiers).
Le préfet – on l’oublie un peu trop – ne fait pas de politique. Le doigt sur la couture du pantalon, il obéit aux injonctions de la tutelle ministérielle.
Alors que commence le second mois de réclusion et à la demande d’honorables correspondants des confins provinciaux de la ConfinFrance (il faudra vous faire à cette sémantique), le moment est venu  de procéder au classement officiel de l’efficience préfectorale ConfinFrançaise à la date du 17 avril 2020 (J 32), selon la méthode dite du casta.quota.con.fi et, bien entendu, sur la base d’informations dignes de foi. Ce classement sera publié toutes les semaines. Si vous souhaitez porter à notre connaissance des agissements préfectoraux spectaculaires, il vous suffit d’écrire un message dans les commentaires de ce journal.  Vos informations sont précieuses. N’ayant que deux bras et une tête et ne disposant pas de secrétariat, je ne peux, par conséquent, pas être partout à la fois.
1. Didier Lallement, préfet de police de Paris
Didier Lallement possède un avantage indéniable sur ses confrères : il part de très loin, de Bordeaux précisément, où certains flics n’hésitaient pas à le taxer de « fou furieux ». À tel point que s’est posée la question : doit-on l’inclure dans ce classement, ou le laisser à l’écart, au-dessus du minus habens préfectoralis ?
Ce fils spirituel de Maurice Papon et de Philippe Pétain, dont les actions spectaculaires font épisodiquement se retourner ses maîtres dans leur tombe et dont je dresserai (J 43) le portrait  sans concessions (mais sans aucune mauvaise intention non plus) ne tient pas en place. Son antépénultième prestation – insinuer que les malades du Covid-19 en réanimation n’avaient pas respecté le confinement – lui a valu la haine du personnel soignant et un remontage de bretelles de Christophe Castaner, qui pensa un instant le remplacer par le terrible préfet Philippe Rey, qui s’était fait remarquer sous la présidence Sarkozy – comme le temps passe – par sa répression impitoyable, par voie de justice et d’outrage, des défenseurs des sans-papiers.
Dernière prestation remarquée : un laxisme, quelque peu étonnant, lorsque des prêtres intégristes ont bafoué les règles du confinement en organisant nuitamment une messe de Pâques en l'église Saint-Nicolas-du-Chardonnet. La messe fut dite sans intervention des forces de l’ordre.

2. Claude d’Harcourt, Loire-Atlantique
Tout comme le préfet de Paris, Claude d’Harcourt, qui s’est fait remarquer par sa brutalité  dans la bonne ville de Nantes, bénéficie d’un bilan hors-pair, comme le rappelaient en 2019 les anarcho-zadistes de Nantes Révoltée, ce qui lui confère un statut hors-catégorie. Avant d’arriver à Nantes, où il fut fait préfet par Macron et remplace la préfète Nicole Klein, qui ravagea la ZAD de Notre-Dame-de-Landes, Claude d’Harcourt, lignée noble, livret ignoble, dirigeait l’Agence régionale de Santé (ARS) de Marseille. Comportement arrogant, agressivité, humiliations, harcèlement ; le magazine Marsactu évoquera un management à la serpe. En mai 2019, D'Harcourt couvre la répression d’une fête foraine de Nantes, noyée sous les lacrymogènes.  Le 21 juin 2019, il encourage la répression brutale de la fête de la musique, qui provoquera la noyade de Steve Maio Caniço dans la Loire. D’aucuns prétendent que Claude d’Harcourt serait un fasciste pur-jus, ce qui n’est pas impossible. D’autres le disent psychopathe, ce qui est plausible mais pas certain.
Malgré ses états de service impeccables, qui ont fait saliver le ministre de la Matraque Castaner, nul n’est irremplaçable, et sa position est par conséquent amovible. Une faiblesse de sa part, et il sera impitoyablement rétrogradé. Les préfets, bien que les apparences n’en laissent souvent rien deviner, sont aussi des êtres humains.

3. Pierre Ory, Vosges
Le Vosgien, on le sait, est d’un naturel bavard, voire pipelet. Dans ce pays à l’urbanisation galopante, où les occasions de rencontrer un être humain et de diffuser des miasmes sournois sont nombreuses, il fallait prendre des mesures énergiques pour mettre un frein à l’irrépressible soif de papoter des Vosgiens. Dans un arrêté du 8 avril, Pierre Orypréfet décontracté, en fonction à Epinal depuis janvier 2018, a pris une mesure impitoyable : interdire tout rassemblement statique dans les rues, ce qui veut dire qu’on n’a plus le droit de parler à un ami croisé lors d’un déplacement dérogatoire. Dans sa grande mansuétude, le préfet a accordé une dérogation aux conversations avec son chien, et autorisé les conversations dans les files d’attente pour achat de première nécessité.

4. Thierry Couderc, Seine-et-Marne
L’homme n’a jamais tenu un fusil de sa vie et il n’est guère, comme certains de ses confrères – dont nous tairons le nom –, attiré par l’odeur du sang des manifestants. Il n’empêche ! Comme tout préfet, la tentation de l’ordre l’obsède. Et comme en ces temps troublés, il est nécessaire, pour un préfet, de faire preuve d'ingéniosité pour se faire bien voir par Beauvau, Thierry Couderc a décidé de frapper un grand coup le 3 avril. Il a donc dressé une liste de 50 chasseurs assermentés, les autorisant à traquer les promeneurs déconfinés dans les bois et forêts du département. Ce volontarisme forcené ne lui a pas porté chance : quelques jours plus tard, il était contraint de revenir sur sa décision. Il y a donc fort à parier que vous ne le retrouverez pas dans cette liste à J 39.


5. Patrice Faure, Morbihan
Arrivé dans le Morbihan en août 2019 après un parcours qui le mena sans barguigner de la DGSE à la GuyanePatrice Faure, qui ne semble pas être un mauvais bougre, s’est jusqu’ici fait remarquer par sa propension à ne pas faire de vagues.
C’était compter sans le Covid-19 ! Il vient de marquer les esprits en décrétant l’interdiction de la vente d’alcool à ces grands poivrons que sont les Bretons en général, et les Morbihanais en particulier. « Il y va de l’intégrité des individus et des familles » affirme-t-il, prétendant que moults horions alccolifères auraient semé la désolation dans les foyers. On ne saurait l’en blâmer. Les habitants de ce département, préservé du Covid-19 mais soumis à la réclusion, comme chaque ConfinFrançais, sont prévenus. Dans sa grande mansuétude, le préfet a néanmoins autorisé les alcools soft : cidre, vin, bière. Le chuchen est exclu, ce qui pourrait lui porter préjudice.

6. Catherine Ferrier, Tarn
Il aura fallu la bêtise crasse d'un gendarme pour que Catherine Ferrier figure dans ce classement provisoire et aléatoire. Le 14 avril, Hedwig, 79 ans, rend visite à son mari Jean-Jacques, 93 ans, confiné à la maison de retraite de Graulhet. Alors qu’elle communique avec son époux à travers la fenêtre, lui écrivant des mots doux sur une ardoise, un gendarme au cerveau défaillant lui dresse une contravention de 135 €. L’affaire fait le tour de la ConfinFrance, suscitant colère et indignation. Deux jours plus tard, la gendarmerie, nous apprend Le Pandore et la Gendarmerie, fait son mea-culpa et retire le PV.
Mme la Préfète, repentante mais un peu tard. Jean-Jacques, époux d’Hedwig, et leur chat
Dans un premier temps, la préfète du Tarn, contactée par la fille du couple, avait confirmé la légalité de cette verbalisation : «Même si la visite en extérieur de votre mère peut être considérée comme une assistance à personne vulnérable, un cordon sanitaire autour des Ehpad doit être absolument respecté. De ce fait, votre mère était bien en infraction. »
Ce n’est qu’après l’ébruitement du scandale que Catherine Ferrier a reconnu qu'il y avait « peut-être eu un peu d'excès »Et c’est ce qui lui vaut de figurer à cette place. Qu'on ne vous y retrouve pas, Mme la Préfète, et que cela vous serve de leçon !